Le Dropt ou ... le Drot ? |
ou ?
Ces deux plaques visibles aujourd'hui sur deux ponts du Dropt, respectivement à Eymet et Gironde, montrent bien que l'interrogation ci-dessus est toujours d'actualité.
Son nom apparaît dans un texte en 1004 sous la forme Droth; il est ensuite écrit Drot (1053). On pense à une origine gauloise (incertaine), construction à partir de dubro = eau et d'un suffixe donnant Dubreto puis Drob(e)to et enfin Drot (filiations latines : Dirsus (dictionnaire de Trévoux 1752) , Drotius, Drogatus (dictionnaire de la France 1844)).
La forme courante, du Moyen - Âge au milieu du 18ème siècle, retrouvée dans tous les documents et cartes, est incontestablement è
le Drot |
La forme Dropt apparaît au 18ème siècle, probablement à la suite d'un lapsus commis par un cartographe du Roy (Belleyme ? Cassini ?), lapsus repris de document en document jusqu'à devenir progressivement la règle. Il est à peu près certain que le « p » est ici une lettre purement explétive et parasite, comme il l'est aussi dans l'affluent de la Seine « Epte » (Ete, Ette, etc... dans les documents anciens)
Cette forme imprononçable a de tout temps suscité de vives réserves. On lit ainsi dans le "Dictionnaire géographique et administratif de la France" (6 volumes - édition de 1892) : « Aucune des anciennes formes latines : Drotius, Drucum ou françaises : Droth (1004), Drot (1053), Droz (1095), n’autorise le p dont on affuble souvent le nom de cette rivière en l’écrivant Dropt. »
Le Dictionnaire Historique de la France de Ludovic Lalanne (édition de 1877) donne Drotius. Ceci peut légitimer par la raison et le bon sens l'écriture Drot .La forme Drot a été utilisée couramment jusqu'au début du 20ème siècle dans de nombreux documents :
cartes de Cassini et de Belleyme (fin 18ème siècle)
tous documents d'archives sur moulins, ponts (19ème siècle)
la Notice historique sur la ville de Castillonnès de J.-J.OSCAR BOUYSSY (1875)
Nouvel Atlas Classique par M.Fallex - Lib. Delagrave (1922)
etc...
Aujourd’hui :
lorsqu’il entre dans le Haut Entre-deux-Mers (Gironde), le Dropt redevient le Drot…
Dès
le premier pont entre Duras (47) et Monségur (33), la plaque apposée côté
Gironde indique bien sûr ... "le Drot". Au pied de Monségur, c'est évidemment "le Drot", des deux côtés ! |
Il faut peut-être voir dans ce singularisme du Haut Entre-deux-Mers une survivance de l'esprit frondeur des Gascons...
A Gironde, la situation est confuse :
Le pont de la RN 113 porte la plaque : |
Les entrées d’agglomération (le panneau de la N 113, imposé par les Ponts et Chaussées, est à quelques mètres de la plaque du pont ! …), fournissent des indications divergentes selon la catégorie de voie .
Le Comité de Liaison de l’Entre-deux-mers édite la brochure « Comprendre les moulins à eau de l’Entre-deux-mers » où l’on peut lire : « Présentation du Drot : le Drot, écrit parfois Dropt...» ; ce « parfois » est savoureux !
On trouve ce dualisme Dropt/Drot jusque sur les étiquettes de bouteilles de vins de Bordeaux :
Alors, « Drot » ou « Dropt » ?. Il faudrait pouvoir choisir
La raison et le cœur diraient : Vive le Drot !...
Nouveau : courrier reçu (avril 2007) : « je me souviens d'avoir lu, dans les années 60, dans le Journal Officiel, un arrêté officialisant l'écriture DROT; d'autres noms avec PT étaient également concernés ». Qui en sait plus ?